Coralie Daven, ex-notaire et créatrice d'une plateforme dédiée à la compréhension du droit, tire la sonnette d'alarme dans les colonnes du Figaro Immobilier. Son message est sans équivoque : le testament n'est pas le meilleur moyen de se protéger lorsqu'on achète sans être marié.
Cette professionnelle du droit a été témoin d'une situation qui illustre parfaitement les limites de cet outil juridique : un couple pacsé ayant rédigé des testaments après l'achat d'un bien immobilier, avant que l'un des partenaires ne révoque le sien une semaine plus tard, dans le dos de l'autre.
Cette histoire, loin d'être isolée, révèle une vulnérabilité que vous devez absolument connaître avant de franchir le pas de l'achat immobilier en couple non marié. La protection de votre partenaire pacsé mérite une attention particulière, et les solutions traditionnelles ne sont peut-être pas aussi solides que vous le croyez.
Les droits successoraux des partenaires pacsés : une réalité à connaître
Le PACS (Pacte Civil de Solidarité) crée des obligations entre partenaires de leur vivant, mais la situation change radicalement au moment du décès. Contrairement aux idées reçues, les droits succession PACS ne fonctionnent pas comme ceux du mariage. Cette distinction juridique peut avoir des conséquences dramatiques pour le partenaire survivant, particulièrement lors d'un achat immobilier commun.
Le vide juridique de la succession pacsée
En l'absence de testament, le partenaire pacsé survivant ne figure tout simplement pas dans l'ordre des héritiers légaux. La loi française établit une hiérarchie stricte :
- Les enfants du défunt héritent en priorité
- À défaut d'enfants, ce sont les parents qui héritent
- Puis les frères et sœurs
- Enfin, les autres membres de la famille
Votre partenaire de PACS ? Il n'apparaît nulle part dans cette liste. Zéro droit automatique. Zéro protection légale. Cette réalité juridique signifie qu'en cas de décès, le survivant peut se retrouver totalement exclu de la succession, même après des années de vie commune.
Les conséquences concrètes sur le patrimoine immobilier
Prenons le cas d'une succession partenaire pacsé sans enfants. Vous achetez ensemble un appartement, comme Adrien et Julien dans le 18e arrondissement parisien. Vous remboursez le crédit à deux pendant des années. Vous rénovez, vous investissez votre temps et votre argent. Puis l'un de vous décède sans testament.
Le partenaire survivant découvre alors qu'il devient copropriétaire avec la famille du défunt. Les parents, les frères, les sœurs deviennent vos nouveaux partenaires d'indivision. Vous ne pouvez plus décider seul de l'avenir du bien que vous considériez comme votre foyer.
L'indivision avec la belle-famille : un piège juridique
L'indivision belle-famille représente l'un des scénarios les plus complexes et stressants. Chaque décision concernant le bien nécessite l'accord de tous les indivisaires :
- Vendre le bien ? Impossible sans leur consentement
- Réaliser des travaux ? Vous devez obtenir leur accord
- Louer une partie du logement ? Même problématique
Les tensions familiales, déjà présentes dans certains cas, peuvent s'amplifier autour de questions financières. Certaines familles peuvent souhaiter vendre rapidement pour récupérer leur part, vous forçant à quitter un logement où vous aviez construit votre vie. D'autres peuvent bloquer toute décision, créant une situation d'immobilisme total.
Cette vulnérabilité juridique explique pourquoi sécuriser la transmission devient une priorité absolue pour les couples pacsés propriétaires.

Le testament : un outil traditionnel mais fragile pour les couples non mariés
Le testament représente l'instrument juridique le plus couramment utilisé par les couples pacsés pour organiser leur succession. Son mécanisme permet à chaque partenaire de désigner l'autre comme bénéficiaire de tout ou partie de son patrimoine.
En l'absence d'enfants, vous pouvez léguer l'intégralité de vos biens à votre partenaire de Pacs. Cette disposition testamentaire peut porter sur la pleine propriété du bien immobilier ou se limiter à l'usufruit, selon vos souhaits et votre situation familiale.
L'histoire d'Adrien et Julien illustre parfaitement la fragilité de cette protection. Ce couple pacsé, après l'acquisition de leur appartement de 62 mètres carrés dans le 18e arrondissement de Paris pour 558 000 euros, s'est rendu chez Coralie Daven pour rédiger des testaments réciproques. « Ils parlaient d'adoption, de vacances à Naples et de rénovation de ce bien fraîchement acheté », raconte l'ancienne notaire. L'atmosphère était à l'engagement, à la construction d'un avenir commun.
Le caractère révocable : une épée de Damoclès
La situation a basculé une semaine après la signature. Julien est revenu seul à l'étude notariale, le visage fermé, pour révoquer son testament. Cette décision unilatérale révèle la principale faiblesse de cet acte : sa nature révocable à tout moment, sans justification nécessaire. « Il en a le droit absolu », confirme Coralie Daven. « Le testament est un acte par nature révocable à tout moment et sans avoir à se justifier. »
Les conséquences de cette révocation sont considérables pour Adrien. Si Julien venait à décéder, son partenaire se retrouverait automatiquement en indivision avec la belle-famille sur le bien immobilier qu'ils ont acheté ensemble. Cette situation génère plusieurs risques :
- Tensions familiales et conflits sur la gestion du bien
- Vente forcée du logement à la demande des héritiers légaux
- Exclusion des décisions importantes (travaux, location, gestion courante)
- Impossibilité de conserver le logement commun
Le plus troublant reste qu'Adrien n'apprendra probablement jamais cette révocation avant l'ouverture de la succession. « Il ne dispose d'aucun recours si la révocation est régulière », précise l'ancienne notaire. Le testament révocable crée ainsi une fausse sécurité, une protection qui peut s'évaporer en silence, laissant le partenaire survivant dans une situation précaire face aux héritiers légaux.
Les alternatives au testament : la donation comme moyen plus sûr de protéger son partenaire non marié
Face aux failles du testament révélées par l'histoire d'Adrien et Julien, une solution juridique plus robuste s'impose pour les couples non mariés : la donation irrévocable. Cette alternative offre une protection bien supérieure au testament traditionnel, comme le souligne l'expertise de Coralie Daven. Une ex-notaire alerte : le testament n'est pas le meilleur moyen de se protéger lorsqu'on achète sans être marié.
La donation : un engagement définitif
La transmission par donation se distingue fondamentalement du testament par son caractère irrévocable. Contrairement au testament que vous pouvez modifier à tout moment dans le dos de votre partenaire, la donation constitue un acte définitif. Une fois signée devant notaire, vous ne pouvez plus revenir sur votre décision. Cette permanence garantit au partenaire bénéficiaire une sécurité juridique réelle et durable.
Le donateur transfère immédiatement la propriété du bien ou d'une partie de celui-ci à son partenaire. Cette transmission s'opère du vivant des deux parties, créant ainsi des droits acquis que personne ne peut remettre en question ultérieurement.
Usufruit ou pleine propriété : deux options à considérer
La donation vous offre deux possibilités distinctes selon vos objectifs patrimoniaux :
La donation en pleine propriété transfère l'intégralité des droits sur le bien à votre partenaire. Il devient propriétaire à part entière, avec tous les droits d'usage, de jouissance et de disposition. Cette option convient particulièrement aux couples souhaitant une protection maximale du partenaire survivant.
La donation d'usufruit permet au bénéficiaire d'utiliser le bien et d'en percevoir les revenus (loyers, par exemple) sans en être propriétaire. La nue-propriété reste entre vos mains ou peut être transmise à d'autres héritiers. Cette formule offre un équilibre intéressant : votre partenaire peut continuer à vivre dans le logement après votre décès, tandis que vos héritiers conservent des droits sur le bien.
Les avantages concrets de l'irrévocabilité
L'irrévocabilité de la donation élimine le risque de révocation silencieuse qui a piégé Adrien. Votre partenaire ne se retrouvera jamais dans la situation où, croyant être protégé, il découvre après votre décès que vous aviez annulé votre engagement. La donation crée une sécurité psychologique autant que juridique : vous savez que votre partenaire est définitivement protégé, quelles que soient les évolutions de votre relation.

Aspects pratiques à considérer lors d'un achat immobilier en couple non marié
L'achat immobilier en couple non marié nécessite une préparation juridique minutieuse. Vous devez anticiper plusieurs aspects pratiques avant de signer l'acte d'acquisition, que ce soit pour un appartement parisien dans le 18e arrondissement ou ailleurs.
Les décisions à prendre avant l'achat
Le choix du régime de propriété constitue votre première décision cruciale. Vous pouvez opter pour :
- L'indivision classique (50/50 ou selon vos apports respectifs)
- La clause de tontine (le survivant devient automatiquement propriétaire)
- La SCI (société civile immobilière) pour une gestion plus souple
Chaque option présente des avantages et des inconvénients spécifiques à votre situation. L'indivision reste la formule la plus courante pour les couples pacsés, mais elle expose le partenaire survivant à des risques importants en cas de décès.
La rédaction d'une convention d'indivision
Vous avez intérêt à faire rédiger une convention d'indivision par un professionnel du droit. Ce document précise :
- Les quotes-parts de chacun dans le bien
- Les modalités de gestion quotidienne
- Les conditions de sortie de l'indivision
- Les règles en cas de désaccord
Cette convention vous protège contre les blocages décisionnels et clarifie les droits de chaque partenaire. Elle peut prévoir un droit de préemption permettant au survivant de racheter la part du défunt avant la belle-famille.
L'accompagnement juridique personnalisé
Vous ne devez pas négliger l'importance de conseils juridiques adaptés à votre projet d'achat immobilier. Un notaire ou un avocat spécialisé vous aide à :
- Évaluer les risques liés à votre situation personnelle
- Choisir les outils de protection les plus appropriés
- Rédiger les actes nécessaires pour sécuriser la transmission des biens immobiliers
- Anticiper les conséquences fiscales de vos choix
L'investissement dans un accompagnement professionnel vous évite des conflits post-décès coûteux et douloureux. Vous gagnez en sérénité en sachant que votre partenaire pacsé bénéficie d'une protection juridique solide.
La documentation à conserver
Vous devez rassembler et conserver précieusement tous les documents relatifs à votre achat : justificatifs d'apports personnels, contrats de prêt, factures de travaux, actes notariés. Ces pièces serviront à prouver vos droits et vos contributions respectives en cas de litige ou de succession. Vous facilitez ainsi le règlement de situations complexes et protégez vos intérêts à long terme.
Conclusion
L'histoire d'Adrien et Julien illustre parfaitement pourquoi une ex-notaire alerte : le testament n'est pas le meilleur moyen de se protéger lorsqu'on achète sans être marié. Vous pensez peut-être avoir sécurisé votre avenir en rédigeant un testament, mais cette protection peut s'évaporer du jour au lendemain, sans que vous en soyez informé.
La sécurité juridique couple non marié exige une vigilance accrue et une compréhension approfondie des mécanismes de transmission patrimoine disponibles. Vous devez vous informer avant de franchir le pas de l'achat immobilier en couple non marié. Les conséquences d'un choix mal adapté peuvent être dévastatrices pour le partenaire survivant.
Pour protéger partenaire pacsé donation vs testament, la balance penche clairement en faveur de la donation irrévocable. Cette solution offre :
- Une sécurité juridique incontestable grâce à son caractère définitif
- Une protection réelle contre les changements d'avis unilatéraux
- Une tranquillité d'esprit pour construire votre projet de vie commun
Vous méritez une protection solide, pas une promesse révocable. Consultez un professionnel du droit avant tout achat immobilier pour choisir l'outil juridique adapté à votre situation. Votre partenaire compte sur vous pour prendre cette décision éclairée.
Questions fréquemment posées
Quels sont les droits successoraux des partenaires pacsés en matière d'achat immobilier ?
Les partenaires pacsés n'ont pas de droits successoraux automatiques en l'absence de testament, ce qui peut entraîner des risques d'indivision avec la belle-famille et compliquer la transmission du bien immobilier commun.
Pourquoi le testament n'est-il pas le meilleur moyen de protéger son partenaire non marié lors d'un achat immobilier ?
Le testament est un outil traditionnel mais révocable, ce qui signifie qu'il peut être modifié ou annulé à tout moment par le testateur, rendant la protection du partenaire pacsé fragile et incertaine.
Quelles alternatives au testament existent pour sécuriser la transmission d'un bien immobilier entre partenaires non mariés ?
La donation, notamment sous forme irrévocable avec usufruit ou pleine propriété, est une alternative plus sûre que le testament car elle garantit une transmission définitive et protège mieux le partenaire non marié.
Comment fonctionne la donation en usufruit et pleine propriété dans le cadre d'une protection juridique pour les couples non mariés ?
La donation en usufruit permet au donataire de jouir du bien tandis que la pleine propriété inclut la nue-propriété; cette distinction permet de sécuriser la transmission tout en conservant certains droits jusqu'au décès.
Quels conseils pratiques pour un couple pacsé souhaitant acheter un appartement dans le 18e arrondissement de Paris ?
Il est essentiel de consulter un conseil juridique adapté pour sécuriser la transmission des biens immobiliers, éviter les conflits post-décès et gérer les droits en indivision afin de protéger efficacement le partenaire pacsé.
Quel est l'avis de Coralie Daven, ex-notaire, sur la protection juridique des partenaires pacsés lors d'un achat immobilier ?
Coralie Daven alerte que le testament n'est pas suffisant pour protéger les partenaires pacsés ; elle recommande plutôt la donation irrévocable comme solution privilégiée pour assurer une sécurité juridique optimale.